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Breizh Bocage : valoriser davantage les bienfaits environnementaux du bocage

Réservoir de biodiversité, barrière contre l’érosion des sols, participation à la reconquête de la qualité des eaux, captation du carbone, les vertus du bocage ne sont plus à démontrer. Alors que le 2e programme Breizh Bocage (2015-2022) touche à sa fin, un travail est en cours sur son évolution. Le Président de la Région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, et le Président de Dinan Agglomération, Arnaud Lécuyer, ont rencontré ce mardi 16 mars un exploitant bénéficiaire du dispositif, Malo Letonturier, à Créhen. L’occasion d’échanger avec lui sur son rapport au bocage et sur les leviers à actionner pour renforcer l’implication des agriculteurs et de l’ensemble des acteurs de la chaîne afin de tirer profit de toutes les vertus du bocage.

Breizh Bocage, qu’est-ce que c’est ?

La Bretagne est l’une des régions les plus bocagères de France. Pour endiguer la disparition des haies, deux programmes Breizh Bocage ont été initiés par la Région Bretagne, sur la période 2007-2014 puis 2015-2022. Ils consistent à financer des plantations de haies via des fonds FEADER, Agence de l’eau Loire Bretagne, Région Bretagne, départements et intercommunalités.

Breizh Bocage ne pouvait se réaliser sans l’implication, incontournable, des intercommunalités et syndicats de bassins versants qui jouent un rôle de mobilisation et d’animation de premier ordre sur leur territoire. Grâce à eux, aujourd’hui, 40 collectivités (EPCI ou BV) sont engagées, représentant 85% du territoire breton.

Un effort de plantation sans équivalent

L’ensemble des financeurs du programme ont lancé plusieurs enquêtes autour du dispositif Breizh Bocage. Une première évaluation et un recensement de l’IGN, dont les résultats ont été rendus publics le mois dernier, ont permis de dresser un premier état des lieux chiffrés :

  • plus de 5 000 km de haies plantés en 12 ans (soit 6 000 km attendus à l’issue du programme fin 2022) ;
  • depuis 2015, 4 000 exploitations agricoles (soit 18% des exploitations bretonnes) ont planté des haies ;
  • 20 M€ ont été dédiés aux deux programmes Breizh Bocage 1 et 2 ;
  • la plantation des haies représente 2/3 de l’enveloppe mobilisée et l’animation, le tiers restant ;
  • les territoires ont recruté des animateurs Breizh Bocage représentant, à l’échelle de la Bretagne, l’équivalent de 40 temps pleins ;
  • 80% du coût des plantations est soutenu par le programme Breizh Bocage, les 20% restants sont pris en charge par les intercommunalités qui peuvent solliciter une participation financière des exploitants.

Sur la programmation 2015-2022, la Bretagne concentre, à elle seule, via le FEADER, 65% de l’effort national de plantations, soit 10 M€.

Ces chiffres ne doivent cependant pas cacher une autre réalité : aujourd’hui, en Bretagne, des haies disparaissent encore. En effet, l’effort de plantation lié à Breizh Bocage permet tout juste de retrouver l’équilibre perdu à partir des années 50 et lors des grands remembrements.

Les premiers résultats de l’enquête “haie, réalisée par la DRAAF en 2008 et mise à jour courant 2020 par les animateurs Breizh Bocage, révèle que, à l’échelle régionale, la moitié des haies ne montrent plus de signe d’entretien et que seulement 20% du linéaire seraient correctement gérés. Les haies qui disparaissent ont des signes de dépérissement et sont déconnectées des autres haies.

L’impact de l’effort de plantation est bien visible : le bocage progresse là où les agriculteurs en plantent beaucoup. En revanche, sans dynamique de plantation, les densités continuent à diminuer.

Comment faire vivre le bocage ?

Au-delà de la plantation de haies, l’enjeu est donc aujourd’hui de faire vivre ce bocage. Car si la quantité de linéaire de haies plantées doit encore progresser, il est également nécessaire de valoriser ces plantations car toutes ne se valent pas. Une jeune haie, fraîchement plantée, n’a pas les mêmes vertus écologiques et ne pourra pas compenser immédiatement la destruction de haies anciennes.

Aussi, lorsqu’ils envisagent l’avenir du programme Breizh Bocage, les partenaires pensent gestion, valorisation, implication et animation de l’ensemble de la chaîne des acteurs concernés. Ils travaillent à la construction, d’ici la fin de l’été, d’un nouveau programme articulé autour des logiques de plantation, de gestion (label Haie) et de valorisation (filière bois-énergie).

Crédit photo : Région Bretagne – (de g. à d.) M. Letonturier, exploitant agricole, L. Chesnais-Girard, Président de la Région Bretagne, O. Allain, VP à l’agriculture, A. Lécuyer, Président de Dinan Agglomération et A. Leduc, animateur Breizh Bocage.

Les agriculteurs, maillon d’une longue chaine bocagère

Agrocampus Ouest, qui vient de réaliser une enquête sociologique, a mis en évidence que le rapport des agriculteurs à leur bocage était très variable d’un exploitant à l’autre. Ainsi, les éleveurs et agriculteurs bio y seraient plus sensibles que les autres. De même en fonction de l’avancement dans la carrière, du niveau de formation, de l’engagement et des centres d’intérêts personnels, l’implication autour du bocage varie fortement.

L’enquête met aussi en évidence le fait que peu d’exploitants entretiennent eux-mêmes leur bocage et sous-traitent cette partie à des entreprises privées. Les agriculteurs qui l’exploitent eux-mêmes le valorisent en autoconsommation ou en vente directe, sans passer par d’autres acteurs la filière marchande.

Ainsi, si les agriculteurs sont un maillon essentiel de la chaîne, c’est bien l’ensemble de la filière qu’il faut pouvoir animer et mobiliser autour du sujet : de la production des plants et la valorisation du bois en passant par les pouvoirs publics (aides PAC, développement rural, animation…), les chambres d’agriculture et organismes privés qui assurent un rôle de conseil auprès des exploitants, les intercommunalités et syndicat de bassins versants, les CUMA et entreprises de travaux agricoles…

Les labels au service d’une appropriation du bocage ?

Jusqu’à aujourd’hui, la mise en place du programme de plantation Breizh Bocage s’est fortement appuyé sur la puissance publique. L’appropriation du bocage par les agriculteurs s’avère indispensable. Aussi le bocage doit-il être appréhendé dans une approche globale cohérente au sein de l’exploitation. Les solutions de gestion et de valorisation doivent devenir les préalables à toute plantation.

Les labels pourraient être un outil pour faciliter cette appropriation. Le label “haie” s’adresse aux agriculteurs pour certifier une bonne gestion de leurs haies (préservation des fonctionnalités du bocage) et identifie les besoins de plantation. Il s’adresse également aux distributeurs de bois énergie : certification de l’origine du bois, sa bonne gestion et sa proximité (issu de 100% haies certifiées, bilan carbone positif, juste rémunération du producteur, traçabilité).

Le label permet ainsi d’améliorer les conditions de gestion et de valoriser les services rendus par la haie grâce, notamment, à la réalisation d’un plan de gestion durable de la haie à l’échelle de l’exploitation. Des démarches expérimentales de paiements pour services environnementaux (PSE) sont en cours et mobilisent ce label qui permet de quantifier le service.

Le bois énergie en Bretagne

Le bois est la première énergie renouvelable de Bretagne. Il est essentiellement valorisé dans le chauffage domestique avec 550 chaufferies bois en fonctionnement, 552 000 tonnes de bois consommées et 310 000 tonnes de CO2 émis évitées par an. En 2020, 13% du tonnage entrant en chaufferie est identifié comme de la plaquette bocagère.

Visite de terrain chez Malo Letonturier à Créhen

Jeune agriculteur installée depuis janvier 2020, Malo Letonturier exploite 72 ha dont 14 ha en verger (pommes à cidre), sur 2 sites. Alors qu’il s’est engagé dans une conversion en bio pour les cultures (diversification des cultures et prairie pour vente de fourrage en bio), il souhaiterait, à termes, passer en agriculture biologique pour ses vergers.

Il s’est inscrit dans le programme Breizh Bocage et, avec l’appui d’un technicien de Dinan Agglomération, a planté 962 mètres linéaires de haies, cet hiver, qui seront complétés par 800 ml supplémentaires l’hiver prochain.

Au-delà des fonctionnalités écologiques et paysagères de son bocage, l’agriculteur compte le valoriser en broyant de jeunes branches (Bois Raméal Fragmenté BRF) pour apporter de la matière organique aux cultures.

Malo Letonturier est par ailleurs élu municipal et membre de la commission “Erosion” ; ce qui traduit certainement une sensibilité déjà avérée pour le bocage…

Dinan Agglomération : un terrain bocager dynamique

Malo Letonturier a bénéficié de l’accompagnement de Dinan Agglomération qui est l’une des collectivités les plus dynamiques de Bretagne pour améliorer le bocage sur son territoire. Avec près de 400 km plantés en 10 ans, elle a plus que compenser la disparition des haies sur la même période.

Pour Breizh Bocage, Dinan Agglomération assure la maîtrise d’ouvrage des actions de replantation sur un périmètre élargi de 118 000 ha couvrant Dinan Agglo, et l’amont des bassins versants de la Fresnaye et de la Rance (de Plévenon au Nord à Plumaugat au Sud et de Saint-Vran à L’Ouest à Pleudihen à l’Est). Sur la période 2020-2021, elle assure la maîtrise d’ouvrage de 57 km de plantations.

Dinan Agglomération est également très investie sur la question de la valorisation des boisements. Fin 2019, elle a engagé une coopération LEADER transnationale filière bois énergie avec des partenaires locaux (SCIC ENR pays de Rance), nationaux (PNR boucles de seine normande) et européens (en Finlande : Thermopolis, qui est l’équivalent l’Agence régionale de l’énergie, et Metsakeskus, le Centre National forestier de Finlande).

Dans ce cadre, une étude du gisement bois énergie (naturel et industriels/déchets) a été réalisée en 2020 sur le territoire et la structuration (juridique, économique et financière) de la filière bois énergie sur son territoire fait actuellement l’objet de travaux.

Parallèlement, Dinan Agglomération assure une forme de promotion de la filière bois énergie avec un service de Conseil en Energie Partagé (CEP) pour accompagner les communes, les aider à maitriser leurs dépenses énergétiques et impulser des installations moins énergivores et décarbonées pouvant s’appuyer sur de la ressource locale (chaudières bois par exemple).

La collectivité travaille également sur la mise en place du label Haie sur son territoire.

En pratique

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